Overblog
Suivre ce blog Administration + Créer mon blog

Recherche

Playlist 2020

Classements d'albums

11 juin 2013 2 11 /06 /juin /2013 09:26

only_god_forgives.jpgAprès Drive, Nicolas Winding Refn et Ryan Gosling se retrouvent pour Only God Forgives… c’est ce qu’on a entendu un peu partout, avec, comme toujours, un oubli important : le compositeur. Car Cliff Martinez est lui aussi encore de la partie, et les deux derniers films de Winding Refn lui doivent beaucoup. La BO de Drive était déjà mémorable, même si le grand public a, forcément, retenu plutôt les chansons électro-pop que les compos de Cliff Martinez, mais celle d’Only God Forgives est encore plus fascinante (pour la petite histoire, Cliff Martinez a été le batteur des Red Hot Chili Peppers de 1982 à 85, et s’est reconverti depuis 1989 et Sexes, Mensonges et Vidéo de Soderbergh dans la musique de films).

L’œuvre divise, mais on ne pourra reprocher à Nicolas Winding Refn de surfer sur le succès de Drive en cherchant à rameuter les foules, ni à Ryan Gosling de faire des choix consensuels pour continuer à s’attirer les faveurs de son vaste public féminin. Là où tant d’autres auraient tenté de faire un Drive II en refourguant au public ce qu’il a aimé dans le premier, NWR prend le contrepied, et propose avec Only God Forgives un film bien plus radical, glauque et contemplatif.

Pas de « real hero » dans Only God Forgives, mais un anti-héros particulièrement impuissant. Captif et captivé, comme l’est le spectateur face à cette œuvre où triomphe la forme. Le personnage interprété par Ryan Gosling n’a que très peu de prise sur ce monde où il est lui-même bien plus spectateur qu’acteur. Idem dans son rapport aux autres protagonistes de cette histoire. Passif tout au long du film face à son frère, sa maîtresse, sa mère, son ennemi. Mise en abîme d’un film où le héros, comme le réalisateur et le spectateur, s’abandonnent chacun à leur niveau dans la contemplation.

Le rapport primordial dans Only God Forgives entre le héros et sa mère illustre à merveille le parti-pris esthétique du film. Le héros n’a toujours pas coupé le cordon, il est incapable de s’affirmer et se laisse complètement dominer par cette mère toute-puissante et envahissante. On ne peut trouver meilleure métaphore que cette soumission à la mère, cette incapacité à sortir du « cocon », pour figurer la primauté de la forme et de la stylisation sur le fond et l’action. Un univers de sons, d’images et sensations, une expérience sensorielle où la narrativité est secondaire.

La bande originale hypnotico-electro-ambient de Cliff Martinez participe pleinement de cette expérience, la musique et l’image du film sont à ce point envoûtants qu’ils occultent le reste (la psychologie, l’action…) La scène que l’on attend comme le climax du film, la traditionnelle confrontation entre le héros et son ennemi, en est un parfait exemple. Tout comme le personnage interprété par Gosling s’avère incapable de « rentrer » véritablement dans le combat, Winding Refn refuse de livrer au public ce qu’il attend - un combat intense - il filme les protagonistes en grande partie de loin, s’attarde sur les quelques spectateurs, et ce qui domine dans cette scène remarquable, c’est… la musique.

Wanna Fight, musique du combat :

 

 

 

On se prend à ne même plus prêter attention à la confrontation pour se focaliser sur la musique, particulièrement mise en avant dans cette scène, et bien plus captivante que le combat en lui-même.

Bien entendu, ce film déroutant ne peut plaire à tout le monde, et laissera perplexes, voire frustrés, de nombreux fans de Drive. Trop « arty » diront certains, et ça se défend, mais on ne peut, comme le font plusieurs détracteurs du film lus sur le web, le présenter comme un film « kitsch ». Il ne suffit pas qu’un film soit esthétisant et coloré, ni même plus attaché à la forme qu’au fond pour le réduire au « kitsch ». Sinon, Lynch, De Palma, Kubrick, Burton et tout grand cinéaste soignant particulièrement l’image pourrait être taxé de kitsch, ce qu’ils ne sont assurément pas. Il est vrai que Nicolas Winding Refn abuse encore plus du "rouge" qu’ont pu le faire des Lynch et De Palma, mais ce n’est pas ça, la kitsch… le kitsch, c’est Baz Luhrmann, pas ces cinéastes-là. Et la BO de Cliff Martinez - la meilleure que j’aie pu entendre pour le moment cette année - n’a rien de kitsch (à l’inverse, là encore, des BO des films de Luhrmann). Une très belle musique atmosphérique, trouble, contemplative et mystérieuse. Si, comme toute bonne BO, elle prend sa dimension et sa force en adéquation avec les images du film, elle est suffisamment de qualité pour être écoutée indépendamment de l’œuvre.

Vous ne manquerez pas, si vous êtes un lecteur régulier de ces pages, d’y trouver dès le premier morceau « l’Inception Sound » (mais en plus subtil, pas musclé et pétaradant comme on l’entend dans les trailers de blockbusters), quelques légers accents de la géniale BO de Crash, voire même quelques passages vaguement lynchiens (Sister, Pt. 1).

 

La BO d’Only God Forgives

 

 

 

A lire en complément : mon article sur la BO de Drive

 

Partager cet article
Repost0
4 juin 2013 2 04 /06 /juin /2013 22:26

Le 4° des Moments Musicaux (en mi mineur, Op. 16, composé en 1896) de Sergueï Rachmaninov est un exercice de haute volée. Non pas pour sa virtuosité, aussi spectaculaire soit-elle, mais parce que Rachmaninov touche ici à l’extrême du romantisme et de la virtuosité, sans ne jamais tomber dans leurs excès :

A la main gauche : un tourbillon ininterrompu (ou presque) de sextolets. Œuvre virtuose pour la main gauche, mais qui n’a pas une note en trop. On connait les dérives de la virtuosité, trop souvent employée comme poudre aux yeux, comme moyen de masquer un manque d’idées musicales et de musicalité. Mais ici, la virtuosité est au service de l’œuvre, pas l’inverse. Elle n’est pas un artifice, bien au contraire, elle nous entraîne toujours plus profond, et avec une remarquable intensité, dans cet abîme de tourments et de fièvre romantique.  

A la main droite : un thème romantique, poignant sans verser dans le sentimentalisme sirupeux ; affirmé voire héroïque, mais en aucun cas pompier. Un thème qui sait rester digne. Digne comme le sont toujours les interprétations de l’excellent Nikolaï Lugansky, incontournable lorsqu’il est question de Rachmaninov :  

 

Les 6 moments musicaux de Rachmaninov sont en écoute sur Grooveshark (voir aussi leur page wikipedia) 

Comment parvenir à faire aimer des œuvres classiques à un public qui connaît peu ou mal cette musique, ou qui reste conditionné par quelques clichés (musique aristocratique, guindée, poussiéreuse, ennuyeuse, trop complexe, trop sérieuse et tout ce genre de conneries…) Une question que je me pose à chaque fois. Je pourrais aller au plus simple, parler de mon expérience très personnelle de cette musique, vous dire par exemple que cette pièce de Rachmaninov est une des plus belles et captivantes que je connaisse. Elle fait partie des quelques œuvres qui ont fait naître ma passion pour le classique (et pour la musique russe). C’est ce Moment Musical n°4 qui m’a vraiment permis de comprendre ce que devait être la virtuosité. Guitariste débutant à l’époque, j’étais, comme à peu près tout musicien débutant, fasciné par la virtuosité. Il m’a fallu la découverte de cette pièce pour enfin réaliser que la virtuosité n’avait de sens qu’entièrement au service de l’œuvre, jamais pour elle-même.

Cependant, la question que je me pose en partageant cette œuvre ici est moins « comment vous la faire aimer » que « comment ne pas l’aimer » ? J’ai beaucoup de mal à imaginer qu’on puisse rester insensible face à une telle œuvre. Une prof de piano qui vous martyrisait quand vous étiez petit ? Une allergie à la musique classique ? La mafia russe a massacré un de vos proches ? Trop psychorigide pour accepter de plonger dans les émotions et tourments romantiques ? Bref, si ce moment musical n°4 vous laisse de marbre, n’hésitez pas à me le dire, voire m’en donner les raisons…

Partager cet article
Repost0
28 mai 2013 2 28 /05 /mai /2013 17:13

Un bref retour sur ces 5 premiers mois de l'année, avec les meilleurs morceaux et meilleurs albums de Janvier à Mai. Parce que se contenter de bilans de fin d'année, c'est d'un banal... autant commencer dès maintenant.

 

Après une bonne année 2012, le rap et l'électro sont encore à l'honneur par ici en ce début 2013, ils prennent les 6 premières places de mon classement : 3 albums rap et 3 albums électro. Est-ce moi qui suis dans une période électro / rap, ou la production rock / folk de ces derniers temps qui est plutôt décevante ? Un peu des deux, je pense. Ca fait un moment qu'un album rock ne m'a pas mis une bonne claque. Et c'est pourtant la moindre des choses qu'on est en droit d'attendre du rock. Rien de bien excitant parmi les nouveaux groupes, ni chez les "grands anciens" : le dernier Nick Cave est très bien mais trop sage, le dernier Bowie est décevant, le dernier Stooges encore plus...

La dernière nouveauté rock qui m'ait marqué est The New Life de Girls Names, qui n'a qu'un défaut : trop revival 80's. A propos de "noms de filles", mention spéciale à Lisa Germano et Sallie Ford qui relèvent le niveau rock et folk plutôt bas en ce début d'année.  

  

Les 6 albums de ce début d'année :   

 

 

Autechre---Exai.jpg  

 

1. Autechre - Exai (9)

 

clipping midcity

 

2. Clipping - Midcity (9)

 

 the-knife---shaking-the-habitual-copie-1.jpeg 

 

3. The Knife - Shaking the habitual (8,5)

 

4. Ghostface Killah - Twelve Reasons to Die (8,5)

 

5. The Haxan Cloak - Excavation (8,5)

 

6. Inspectah Deck - Czarface (8,5)

 

Le classement complet

   

La playlist 2013 (en cours tout au long de l'année) comporte déjà une cinquantaine de titres, j'ai sélectionné les 13 meilleurs :

 

Playlist Janvier - Mai 2013 

 

 

Une bonne raison d'écouter cette playlist ? Vous voulez dire : une autre bonne raison que celle d'écouter 13 excellents morceaux sélectionnés avec soin ? Eh bien... c'est sans doute la première playlist au monde où vous trouverez enchaînés un morceau d'Autechre et une chanson d'Ana Moura. Si, avec une telle accroche, je n'ai pas su provoquer chez vous une furieuse envie de vous plonger dans cette playlist, c'est que je ne suis définitivement pas fait pour le monde merveilleux du marketing musical (le MMMM)... 

Partager cet article
Repost0