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12 décembre 2012 3 12 /12 /décembre /2012 23:41

Après Dave Brubeck la semaine dernière, c'est au tour d'un autre grand musicien né en 1920 de décéder aujourd'hui... il y a des périodes, comme ça, où Music Lodge se transforme en "rubrique musicale nécrologique", mais impossible de ne pas dire un mot ici de l'un et de l'autre.

 

Ravi Shankar est une figure incontournable de la musique du XX° siècle. Grâce à lui, la musique indienne a influencé bon nombre de musiciens d'occidents, et pas les pires... les Beatles en premier lieu, puisqu'il a appris le sitar à George Harrison, sitar que l'on entend dès Norwegian Wood sur Rubber Soul, puis dans deux morceaux de George Harrison beaucoup plus "indiens", Love You To sur Revolver et Within You Without You sur Sgt Pepper. 

 

 

(Je vous recommande aussi en passant Within You Without You par Sonic Youth)

 

Une influence profonde sur les Beatles, mais aussi sur... les Coltrane - John et Alice - qui appeleront leur fils Ravi, ou Philip Glass avec lequel Shankar collaborera pour l'album Passages. Les Beatles, Coltrane, Glass, soit trois des plus illustres noms des 3 genres musicaux majeurs du XX° siècle en occident. (Non, je ne compte pas la musique minimaliste de Glass comme un "genre majeur", mais la musique classique contemporaine en général). Ravi Shankar est aussi le père d'une des plus célèbres chanteuses de ces dernières années, Norah Jones... comme quoi, tous les chemins mènent à Shankar.

 

 

L'ironie de l'histoire, c'est qu'au fond, il y a eu un peu le même type de malentendu entre la musique psychédélique 60's et la musique indienne qu'entre les hippies et le bouddhisme (ce dont je parlais dans rock et société de consommation). Les musiciens psychédéliques ont, pour la plupart, pris la musique indienne pour une musique libre, planante, et improvisée, alors qu'elle est une véritable "musique savante", au même titre que notre musique classique, basée sur des systèmes et théories particulièrement complexes. La certaine perplexité que montre Shankar dans la vidéo ci-dessus face aux musiciens pop qui font appel à lui, c'est un peu la même que celle des véritables bouddhistes qui ont vu débarquer des hippies défoncés au LSD prétendant atteindre le "nirvana"...

 

Un peu de musique pour conclure, tout d'abord deux morceaux de Ravi Shankar que je vous conseille :

 

 

Et un album qui mérite vraiment le détour, Passages, la collaboration de Philipp Glass et Ravi Shankar. Un très bel album, particulièrement accessible, plaisant, mélodieux et envoûtant, le genre d'album dont personne ne devrait se priver :

 

Ravi Shankar & Philipp Glass - Passages (en écoute sur grooveshark) 

 

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11 mai 2011 3 11 /05 /mai /2011 21:15

Avant de rentrer dans le vif du sujet, une précision qui a son importance, « musiques » et « scandinaves » sont ici à prendre au sens large, il ne s’agit pas de musiques traditionnelles de Norvège et Suède, mais de musiques en tous genres (et plus particulièrement actuelles, je consacrerais un de ces jours un article à part entière aux musiques traditionnelles scandinaves) de Norvège, Suède, Finlande, Danemark et d’Islande.

 

 

Entre pop kitsch, gothic-metal à chanteuses et viking / black metal nazifiant, les musiques modernes scandinaves ne semblent au premier abord pas dignes du plus grand intérêt. A se demander même si ce n’est pas la région du monde la plus consternante d’un point de vue musical. On vante souvent les modèles scandinaves en matière économique, sociale, politique… pas en musique.  

 

Plusieurs des groupes pop les plus racoleurs de ces 30 dernières années sont en effet scandinaves : ABBA, Army of Lovers, Ace of Base (Suède), A-Ha (Norvège), Aqua (Danemark)… tellement racoleurs qu’il leur faut à tout prix des noms en A pour être sûr d’être en tête des bacs. On pourrait aussi ajouter dans les 80’s, les suédois de Roxette (The Look) ou les bien nommés « Fake » (eux aussi suédois).

 

Leur gros tube des années 80, Another Brick

 

 

 

 

C’est bien simple, en musique, les scandinaves semblent être de tous les mauvais coups. Abba avec le disco, A-Ha et autres Fake avec la synthpop 80’s, Army of Lovers et Aqua avec la dance (Aqua et leur Barbie girl ont largement de quoi prétendre au titre de pire rengaine de toute l’histoire de la pop). Et quand ils ne trouvent pas un genre bas de gamme à intégrer… ils l’inventent ! De Malmsteen, le « guitar-hero-metal-neo-classique », au black metal…

 

Les scandinaves sont « bons »… ou du moins très prolifiques dans les deux extrêmes : la pop kitsch et colorée et le black metal. Et j’ai bien une petite théorie là-dessus, qui vaut ce qu'elle vaut... La Scandinavie est la région la plus « féministe » du monde, un féminisme qui tend à gommer au maximum les différences comportementales entre hommes et femmes. Une région du monde où payer un verre ou le restaurant à une fille vous fera passer pour un sale oppresseur macho plutôt qu’un homme galant.

Ces deux extrêmes musicaux sont alors le moyen d’exprimer ce qui ne peut plus vraiment « se vivre » là-bas, d’y aller à fond quitte à outrepasser toutes les limites du bon goût. La ravissante blonde idiote qui se dandine en chantant des bluettes sucrées, et le gros bourrin violent qui martèle sa batterie ou éructe son surplus de testostérone dans un micro. Le féminin et le masculin dans ce qu’ils ont de plus caricatural…

 

Les scandinaves brillent… dans ce qui a pu se faire de pire dans le metal :

 

-         Le « gothic-metal à chanteuses » lisse et pompeux, avec son imagerie dark-MTV (pour reprendre un terme de Ska), dont les fers de lance sont les finlandais de Nightwish, les norvégiens Theatre of Tragedy, Sirenia et Tristania ou encore les suédois Draconian.  (Si vous voulez rire un bon coup, une vidéo de Nightwish : Amaranth). 

-         Les mélanges indigestes classique – métal, avec le « maître » du genre, le suédois Malmsteen, les finlandais Stratovarius et leurs compatriotes Apocalyptica, le  « quatuor à cordes metal ».

-         Le hard FM le plus commercial qui soit, avec les suédois d’Europe et leur célèbre « Final Countdown ».

-         Le groupe grand-guignol Lordi, finlandais vainqueurs du concours de l’Eurovision, c’est dire…

-         Et, enfin, le black metal, en grande partie norvégien. Ah, le black metal… son imagerie sataniste outrancière, ses hurlements, ses maquillages et accoutrements burlesques, ses musiciens aux noms de démons, ses claviers grandiloquents, son nationalisme, ses dérives nazies, ses faits divers (profanation de cimetières etc.), un chef de file charismatique et ouvertement raciste (Varg Vikernes, leader de Burzum) condamné pour le meurtre du guitariste de Mayhem… mais ne soyons pas trop critiques, après tout, ils luttent courageusement contre le plus dangereux et terrifiant ennemi de notre monde moderne : le christianisme !

-         Et de l’autre bord, c’est pas mieux, avec – ne riez pas - du « christian symphonic power metal » par les finlando-suédois de Divine Fire.

 

La Scandinavie serait donc le temple du mauvais goût musical ? Une zone musicalement sinistrée ? Heureusement, non. Le tableau n’est pas très glorieux, mais ils ont tout de même quelques musiciens intéressants.

 

L’idée de cet article ne m’est pas venu pour taper sur la musique scandinave – même s’il y a  de quoi faire – mais bien parce que 3 de mes découvertes les plus frappantes ces dernières années viennent du nord : les norvégiens de The Low Frequency in Stereo, le compositeur contemporain islandais Daniel Bjarnason et les suédois The Skull Defekts. Petit tour d’horizon, maintenant, de ce qui se fait de mieux à mon sens dans ces contrées.

 

Classique

 

En classique… pas de quoi trop s’emballer non plus, c’est le minimum syndical, un seul grand compositeur pour chacun (sauf l’Islande, qui n’en a même pas), tous trois post-romantiques : Grieg pour la Norvège, Sibelius pour la Finlande, Carl Nielsen pour le Danemark (auquel on pourrait ajouter le baroque Buxtehude, danois et allemand). Et pas des compositeurs de tout premier plan non plus, malgré leurs qualités.

Le norvégien Grieg est le plus célèbre des 3, notamment pour son fameux Peer Gynt et son concerto pour piano en la mineur, mais les œuvres symphoniques de Sibelius (surtout) et Nielsen méritent vraiment le détour…

 

Jazz

 

S’il y a un genre musical où les scandinaves ont su créer quelque chose d’assez convaincant, c’est le jazz et l’electro-jazz. N’en déplaise aux puristes qui considèrent que le jazz, le vrai, se doit d’avoir du swing, être intense, « terrien » et sensuel. Bref, le jazz noir américain des années 20 aux années 70. J’ai beau être aussi un adepte de ce jazz de l'âge d'or et ne pas trop aimer le jazz « blanc, lisse et bourgeois » qui sévit depuis quelques décennies, le jazz scandinave a su se trouver, ne pas se contenter de vider le jazz noir de ses aspérités, mais l’adapter à son environnement avec ses atmosphères froides, contemplatives et planantes, dignes des grands espaces scandinaves. En partie grâce au label allemand ECM, et à un de ses artistes phares, le saxophoniste norvégien Jan Garbarek (qui a d’ailleurs intégré des éléments de musique traditionnelle norvégienne à sa musique). Autres fameux jazzmen norvégiens chez ECM : Terje Rypdal, E.S.T., Arild Andersen, ou, plus récemment, le pianiste Tord Gustavsen, et, chez les suédois, la violoniste Lena Willemark.

 

Jan Garbarek & Mari Boine (les deux, norvégiens, sont ce qui se fait de mieux dans les musiques scandinaves à mon sens) - Evening Land

 

 

En électro-jazz, le trompettiste norvégien Nils Petter Molvær (lui aussi chez ECM) est incontournable, un des piliers du genre (cf. l’album Khmer, en 1997). Idem pour son compatriote, le pianiste Bugge Wesseltoft, ou encore la formation jazz d’avant-garde Supersilent. Les norvégiens sont les principaux acteurs du jazz « labellisé ECM » et/ou électro-jazz, voilà de quoi leur pardonner le black metal...

 

Electro

 

Les scandinaves ont vite su s’approprier les sonorités froides de l’électro. En jazz, donc, mais aussi dans la pop, avec la plus célèbre artiste scandinave de ces dernières décennies, l’islandaise Björk, ses compatriotes Emiliana Torrini, Mùm, Bang Gang, le trip-hop jazzy du suédois Jay-Jay Johansson, The Knife, les norvégiens Flunk et Jaga Jazzist, les danois Efterklang, Trentemoller, VETO, The Crooked Spoke ou Under Byen, les islandais GusGus… sans parler, bien sûr, de musiciens spécifiquement électro tels Biosphere et Royksopp (Norvège) ou Vladislav Delay et Juri Hulkkonen (Finlande).

 

Rock

 

Pas grand chose à se mettre sous la dent en rock scandinave. Notons tout de même les suédois de the Hives, The Radio dept., Anekdoten (très influencés par King Crimson), The Hellacopters, Lykke Li (et, bien sûr, The Skull Defekts), les islandais Sigur Ros, les danois The Raveonettes, les finlandais 22 Pistepirkko, les norvégiens The Low Frequency in Stereo voire Audrey Horne (non pas qu’ils soient indispensables, mais je ne pouvais les passer sous silence, Twin Peaks oblige)… quelques bons groupes, mais la Scandinavie n'est pas prête de se voir décerné le titre de région la plus rock’n’roll du monde. The Skull Defekts fait vraiment figure d’exception, pas banal de trouver du rock scandinave hargneux, intense (et de qualité !) qui ne soit pas metal.

 

Dans un genre plus folk-rock, il y a les norvégiens Kings of Convenience et les suédois the Tallest Man on Earth, José Gonzalez, ou Anna Ternheim dans un registre pop-folk.

   

Metal

 

Si les scandinaves représentent une bonne partie de ce qui se fait de pire dans le metal, il faut reconnaître qu’ils ont tout de même quelques groupes « importants », qu’on aime ou non le genre.

 

Parmi ceux-ci, les black-metalleux norvégiens Emperor, Darkthrone, Mayhem, Burzum (une quinzaine d’années de prison qui lui auront fait du bien, puisqu’il est revenu l’an dernier avec un album bien meilleur que ce que le black metal laisse généralement à entendre, Belus). Et quelques autres groupes phares du genre (que je ne conseille pas particulièrement) : Dimmu Borgir, Enslaved, Immortal… à noter aussi, le parcours plutôt original d’Ulver, passé avec succès du black metal au trip-hop.

 

En Suède : Bathory, Candlemass (à la base du doom metal), Entombed, Marduk, Meshuggah, Opeth.

 

Le black metal est en grande partie norvégien… pourtant, à l’origine du genre, on trouve un groupe danois, Mercyful Fate (sa musique n’a pas grand-chose de black metal, c’est du heavy-metal début 80’s, mais leurs textes et leur imagerie fait qu’on les considère comme des précurseurs du genre), et, surtout, un groupe suédois, Bathory. Considéré comme étant à l’origine à la fois du « black metal » et du « viking metal ». On en lapiderait pour moins que ça, mais, petite séquence nostalgique, en 1988, Bathory sort Blood Fire Death, j’ai beaucoup aimé cet album dans ma jeunesse… en particulier l’épique dernier morceau de l’album :

 

 

(Je l'ai aussi mis dans la playlist ci-dessous... je le précise pour ceux qui ont l'intention de l'écouter, qu'ils ne se tapent pas deux fois ce morceau de 10 minutes.) 

En 88, c’était assez nouveau, c’était même bien… est-ce que ça nécessitait vraiment d’en faire un genre à part entière (et même deux... le black avec leurs précédents albums le viking/black avec celui-ci) ? 

 

Musiques traditionnelles

 

Il y aurait pas mal de choses à en dire, j’y consacrerai un autre article, comme j’en consacrerai à Sibelius ou Grieg. Mais impossible de ne pas dire un mot de la plus célèbre, la norvégienne Mari Boine, qui intègre des éléments de musique populaire moderne à la musique traditionnelle sami. Je vous recommande notamment son album de 1996 Bálvvoslatjna (Room of Worship). Et l'article de Sunalee sur la technique vocale joik des lapons. 

 

Enfin, pour terminer, après une longue lecture, rien ne vaut... une longue playlist ! J’ai tenté de compiler les morceaux les plus significatifs et réussis des musiques scandinaves actuelles, en essayant, autant que faire se peut, de privilégier des titres capables de plonger l’auditeur dans une atmosphère très « nordique » (à quelques exceptions près, difficile de ne pas mettre le Hate to say I told you so des Hives). Une playlist très éclectique où se côtoient électro, folk, trip-hop, rock, jazz, pop, metal… et même black metal… (par contre, pas de ABBA & co, j’ai aussi mes limites).

 

Playlist scandinave

 

A écouter sur Spotify

 

Ulver – Lost in Moments (Norvège)

VETO – Can You see Everything (Danemark)

Jay-Jay Johanson - The Girl I Love is gone (Suède)

Nils Petter-Molvaer – Tlon (Norvège)

E.S.T. - Serenade for the Renegade (Suède)

Kings of Convenience – The Girl from back then (Norvège)

The Hives – Hate to say I told you so (Suède)

The Raveonettes – Dead Sound (Danemark)

The Skull Defekts – Peer Amid (Suède)

Under Byen – Om Vinteren (Danemark)

Bathory – Blood Fire Death (Suède)

Björk – Storm (Islande)  

Flunk – See through You (Norvège)

Bang Gang – Follow (Islande)  

Efterklang – Frida Found a Friend (Danemark)

Jan Garbarek – Cloud of Unknowing (Norvège)

Trentemoller – Physical Fraction (Danemark)

Sidsel Endresen – Undertow (Norvège)

José Gonzales – Slow move (Suède)

Bugge Wesseltoft – Existence (Norvège)

GusGus – Remembrance (Islande)

Biosphere – Poa Alpina (Norvège)

Royksopp – Poor Leno (Norvège)

Emperor – I am the Black Wizard (Norvège)

Tristania – Mercyside (Norvège)*

Troels Abrahamsen – The World is listening (Danemark)

Emiliana Torrini – Telepathy (Islande)

Anja Garbarek – You Know (Norvège)

Pekka Streng – Katsele Yossa (Finlande)

22 Pistepirkko – Night Train Miss (Finlande)*

The Low Frequency in Stereo – Solar System (Norvège)

Burzum - Morgenrode (Norvège)

Opeth – Porcelain Heart (Suède)

Anekdoten – Thoughts in Absence (Suède)

Terje Rypdal – Over Birkerot (Norvège)

Anna Ternheim – The Ones they Blame (Suède)

Candlemass – Under the Oak (Suède)

The Tallest Man on Earth – It will follow the Rain (Suède)

Jan Garbarek & Mari Boine – Evening Island (Norvège)*

Lena Willemark – Himlen Faller (Suède)

Tord Gustavsen Trio – Sani (Norvège)

The Knife – I take Time (Suède)

Jaga Jazzist – Day (Norvège)

The Hellacopters – By the Grace of God (Suède)

The Radio Dept. – Bus (Suède)

Sigur Ros - [Njosnavelin] (Islande)

Vladislav Delay – Kotilainen (Finlande) * 

Supersilent – 9.1. (Norvège)

Myrkur - Leaves of Yggdrasil (Danemark)

 

Si j’ai oublié quelques artistes scandinaves qui valent vraiment qu’on y jette une oreille, n’hésitez pas à m’en faire part… et à me dire ce que vous aimez - ou pas - dans les musiques scandinaves actuelles. 

 

A lire (et à écouter) :

 

Daniel Bjarnason – Processions

The Low Frequency in Stereo – Futuro

The Skull Defekts – Peer Amid

 

 

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11 avril 2011 1 11 /04 /avril /2011 12:32

Randana  03/03/2011

 

trio joubran

Cet album a un défaut. Un seul défaut, mais un gros : sa qualité sonore est excellente. Et ça, dans les musiques du monde, ça ne pardonne pas. Une faute grave pour les puristes du genre. Rédhibitoire, même. Car le puriste a ses exigences, avec lesquelles il n’accepte que très rarement de transiger, notamment :

 

 

 

 

 

 

 

 

 

- Les morceaux d’un album doivent tous être issus d’un même pays, d’une même région, voire d’un même village. Pas de reprises de morceaux de régions et pays différents, sinon, c’est le bordel.  

 

- Pas question d’entendre cette musique jouée sur n’importe quoi (les instruments occidentaux sont proscrits). Pour vraiment ressentir l’âme de la musique d’une population particulière, il faut que le bois utilisé pour tailler les instruments provienne d’arbres bordant le village. Disons d’arbres dans une circonférence de 2 km maximum autour du village. Pas plus. 

 

- L’enregistrement. Pas de studios hi-tech, d’appareils sophistiqués ou de professionnels du son, non, l’idéal, c’est un ethnomusicologue (en sandales et aux cheveux longs), avec un vieux magnétophone, qui vient saisir discrètement la beauté naturelle de ces musiques. En une prise, évidemment. Et en plein air si possible (jouer pieds nus est un plus, preuve de l’enracinement, de l’attachement à la terre des ancêtres… l’idéal, ce sont des musiciens vêtus de simples pagnes).

 

- Pas de  remixage. Qui est aux musiques du monde ce que sont les pesticides pour les défenseurs des produits bio. Une des particularités du « puriste des musiques du monde », c’est qu’il n’aime rien tant que les « impuretés », les aspérités, qui font le charme de ces musiques exotiques.

 

- Importance de la tradition orale. Les musiciens présents sur l’album doivent être certifiés appartenant à des familles qui résident depuis au moins 6 générations dans le village. D’une lignée de musiciens qui se transmettent oralement les techniques, codes, rythmes, échelles mélodiques de cet endroit du monde particulier. Leur musique doit éviter le prisme de la partition, et de cette foutue écriture occidentale. Si les musiciens sont illettrés, c’est encore un plus. De toute façon, la règle est simple, plus on est loin de tout apport de l’occident et de ses notions de « civilisation », mieux c’est. Le mythe du bon sauvage joue à plein dans les musiques du monde…   

 

- Le puriste n’est pas raciste. Bien au contraire, puisqu’il se passionne pour ces musiques de cultures si éloignées de la sienne. Il n’est pas raciste… mais pas question de lui présenter une pochette d’un album de musique africaine avec un musicien blanc. Même au milieu de dix musiciens noirs. Même si la famille de ce blanc-bec vit depuis plus de 6 générations dans cette région. Et pourquoi pas des asiatiques jouant des musiques brésiliennes ? Soyons sérieux…

 

- Qui dit « musiques du monde » dit surtout « musiques du tiers-monde ». Pauvreté, misère et souffrance sont de rigueur. Ne sont acceptées, dans les pays occidentaux, que les musiques de populations ayant subi la cruauté de l’oppresseur blanc. Comme, aux EU, les indiens ou bluesmen noirs. Mais ne leur parlez surtout pas de musique country. 

 

Le Trio Joubran, donc, enfreint malheureusement la plupart de ces règles d’or. Et, pour le puriste, la déception peut s’avérer aussi grande que l’était l’espoir de départ. Car des musiciens palestiniens, un des peuples qui souffrent le plus sur la planète, voilà de quoi affoler leur curiosité. Mais un tel luxe dans la prise de son, une telle précision, une telle maîtrise instrumentale, ça ne cadre pas avec la région. Le puriste n’y trouve pas l’expression de misère et de douleur qu’il attend, et se sent spolié, trahi. Il se dit alors qu’il faudrait vraiment, comme pour le « commerce équitable », un label « musique équitable », qui respecte les règles énoncées ci-dessus, et lui évite ainsi de tomber sur ce genre d'album trop beau pour être... "vrai".

 

Le site du Trio Joubran 

 

L’album en écoute sur deezer 

 

Sur le même thème (ou presque, je me focalise sur le puriste, Boebis sur les "clichés des musiques du monde") je vous invite à lire le très bon article Vieillards vénérables, enfants rieurs et filles dénudées chez Berceuse électrique... 

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